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CONTEXTE Organisé par le programme transversal du RIRRA 21 « Recherche en création – Recherches transdisciplinaires en poïétique : méthodologies, enjeux & savoirs inhérents aux processus créatifs », ce colloque pluridisciplinaire clora la première année du programme « Recherche en création » du RIRRA 21, consacrée à la notion d' « atelier ». Il fera suite au cycle « L'atelier en pièces», composé de quatre journées d'ateliers réparties dans l'année 2021 (22 janvier, 19 mars, 11 juin, 1er octobre), cycle lui-même précédé, le 3 décembre 2020, par un séminaire liminaire intitulé « Ouvrir l'atelier », dans lequel sont intervenus chercheuses et chercheurs du RIRRA 21 inscrits dans différentes disciplines : arts numériques, arts plastiques, jeux vidéo, danse, théâtre, littérature.
ARGUMENTAIRE Dans « La Poïétique », article de 1971 qui servit d’introduction à Pour une philosophie de la création, recueil publié en 1989 dans la collection « Esthétique » des éditions Klincksieck, René Passeron définit la poïétique comme « la promotion philosophique des sciences de l’art qui se fait », ajoutant que « pour elle », la peinture se comprend comme « un phénomène d’atelier » – à l’inverse de l’esthétique qui la conçoit comme « un phénomène de galerie, de musée, de lieu public1 ». En continuité avec cet héritage, ce colloque pluridisciplinaire entend cependant retourner la proposition du philosophe : il s’agit en effet d’y questionner ce phénomène qu’est l’atelier à la lueur de toutes les disciplines qu’intéresse la recherche en création. C’est donc l’atelier en acte(s) à la croisée des arts que nous nous proposons d’étudier : en quoi l’atelier (quels qu’en soient les hétéronymes : studio, fabrique, workshop, laboratoire…) participe-t-il de ce que le philosophe Michel Guérin propose sous le néologisme de « topoïétique2 » ? Car si créer « veut dire : donner lieu (au lieu)3 », l’atelier constitue alors de façon paradigmatique ce lieu singulier/commun (topos/idios), réel/symbolique, fixe/mouvant… qui donne lieu au lieu de l’œuvre. Aussi, réfléchir à cette sorte d’ ‘’archi-lieu’’ qu’est l’atelier invite-t-il à considérer, avec l’esthéticien, que « bien penser (ou penser complètement) la ‘’poïétique’’ suppose qu’on prenne en charge la considération topique non comme un trait adventice, mais comme un trait essentiel de la poiésis4. » Axe 1 : Nommer l’atelier – Approches terminologiques Atelier, workshop, studio, laboratoire, laboratory/lab, fabrique, factory, manufacture, (arrière-)boutique, loge, cabinet, ouvroir, cénacle, chantier… Nommer l’atelier, cet espace réel autant que symbolique, privé autant que collectif, fermé autant qu’ouvert, fixe aussi bien que nomade […], c’est déjà construire en la supposant une certaine façon d’habiter l’espace de la création, et par là en présager les formes processuelles, les dispositifs, les protocoles : quand l’atelier devient factory, ce n’est pas seulement le terme qui change, mais bien un rapport au créer. Ainsi, atelier et/ou laboratoire, pour l’artiste-chercheur ? L’un est-il soluble dans l’autre ? Les termes ne sont pas neutres, en effet, qui, s’ils trahissent souvent la discipline (l’atelier pour le plasticien, le studio pour le danseur, le laboratoire pour l’écrivain numérique5…), manifestent plus subtilement un certain rapport à l’espace symbolique de la (recherche en) création. Car s’il apparaît foncièrement oxymorique dans ses représentations, l’atelier fait aussi le jeu du procès métonymique : le lieu est « mis pour » ce qui s’y trame comme pour ceux qui y œuvrent (l’atelier d’arts plastiques ou l’atelier d’écriture héritant de l’atelier entendu comme groupe d’apprentis se formant auprès d’un maître), de même qu’un « chantier » définit simultanément un endroit et l’œuvre en devenir qu’il abrite/révèle. Le où infère par conséquent un comment qui s’attache à un quoi… Nous proposons donc de réfléchir aux façons que la recherche en création a de nommer ses ateliers : en les nommant, elle définit, de fait, des espaces, des enjeux, des méthodes. Axe 2 : Qu’est-ce qui fait atelier ? – Approches épistémologiques Comment pratiquer, reconnaître et concevoir le « lieu » de l’atelier dans une démarche en recherche-création (quels qu’en soient les attachements disciplinaires) ? Qu’est-ce qui (dé)fait (l’)atelier ? Simultanément « chambre à soi » et « lieu commun », à quelles u-topies, ou plus exactement, à quelles « hétérotopies » (en termes foucaldiens) donne-t-il figure et, leur donnant lieu, raison d’être ? Pratiquer l’atelier fait-il habiter ? Qu’en est-il, par exemple, de l’atelier in situ, quand l’œuvre en train de se faire se greffe sur un environnement qui lui préexiste, que possiblement elle modifie ? Alors que les accueils en résidences constituent aujourd’hui une donnée majeure de l’économie de la création6, déplaçant l’atelier d’un lieu à l’autre dans une discontinuité temporelle et spatiale, nous pouvons également nous interroger sur ‘’ce qui fait atelier’’ dès lors que ce dernier devient portatif et nomade : quelles conditions minimales sont-elles requises pour qu’un lieu devienne atelier ? Appréhendée dans une acception extensive, la notion d’atelier est susceptible d’être interrogée selon différents contextes créatifs, de façon à examiner ce qui distingue et/ou ce qui rapproche des lieux spécifiques du faire : ainsi, comment considérer l’atelier au cinéma, alors même que le film se réalise dans un contexte de création collective ? L’atelier peut-il se penser à partir du tournage, à partir de la salle de montage, au moment de l’écriture, ou plus sûrement à la croisée de ces endroits pourtant singuliers ? S’agissant des arts numériques (et notamment des arts algorithmiques, des arts interactifs et immersifs, ou du net-art), l’espace de l’atelier se situe-t-il ailleurs que dans (celui de) la machine informatique ? Comment, encore, appréhender l’atelier d’un artiste de réalité virtuelle qui sculpte son œuvre en étant lui-même en immersion ? Ou celui d’un artiste qui voit naître différents éléments d’une installation numérique interactive in situ ? Comment penser l’atelier du côté de la création littéraire comme, plus largement, des « arts littéraires7 » ? Où situer l’atelier de l’écrivain-chercheur ? Les pratiques artistiques hybrides (fréquemment numériques et transmédiales) dont témoignent les thèses récentes en recherche en création littéraire, mais aussi la conduite d’ateliers d’écriture qui leur est coextensive, modifient-elles, en renouvelant les pratiques d’écriture, notre façon d’appréhender l’atelier de l’écrivain ? Axe 3 : Que fait l’atelier ? – Approches méthodologiques Si, comme le soulignent Chapman et Sawchuck, « la création en tant que recherche [...] implique l’élaboration de projets où la création est nécessaire pour que la recherche puisse émerger8», l’espace de la création devient alors lui-même un terrain de recherche et d’exploration – en un mot un lieu de « studiosité9». Dès lors, quelle place pouvons-nous accorder à l’atelier comme terraind’une recherche où « la production artistique est nécessaire parce qu’elle témoigne du trajet accompli par le regard introspectif et réflexif du chercheur tant d’un point de vue théorique que pratique » ? Où « [l]a pratique, la création devient un espace poreux où sont enfouis les représentations, les archétypes, les souvenirs, les habitudes, les mémoires gestuelles du praticien que l’on tente de saisir » ? De fait, dans la mesure où « [l]a création est ici objet, sujet et contexte dans lequel évolue la recherche et la manifestation d’une démarche de recherche en art10», doit-on confondre ou au contraire dissocier l’atelier de l’acte de création, voire de son créateur ? Quelle part prend l’atelier dans les conduites instauratrices et les processus créateurs ? Dans une dynamique de recherche-création, l’atelier se révèle en effet un lieu de mise à l’épreuve des matières, matériaux, techniques, technologies, procédés, procédures…, comme des savoirs théoriques et démarches critiques qui interagissent avec eux : comment construire/concevoir/habiter l’atelier pour qu’il soutienne cette double dynamique ? Quels atelier(s)/studio(s) […] pour quelles créations et quels outils pour ces lieux de création ? Et dans quelles conditions ? Nous pouvons ainsi nous intéresser à l’atelier conçu en prévision de la création d’une œuvre ou encore nous demander comment l’œuvre et le processus de création de l’auteur/artiste peuvent être influencés par l’atelier. Par conséquent, quelle place est-elle donnée aux savoirs tacites de l’atelier, que le chercheur peut contribuer à expliciter ? Si, dans les sciences dites « dures », l’on emploie volontiers le terme de « laboratoire », comment, en sciences humaines, qualifier une recherche relative aux pratiques d’atelier ? Axe 4 : Que transmet l’atelier ? – Approches pédagogiques Terrain de recherche, l’atelier se révèle également (et parfois d’abord) un lieu (réel autant que symbolique) de formation et de transmission : dans cette optique, nous questionnerons les méthodologies de transmission et les modalités d’appropriation des savoirs et des savoir-faire qu’il induit, invente et peut-être déconstruit, qu’il s’agisse de l’atelier où la dimension pédagogique se révèle explicite (atelier d’arts plastiques, d’arts numériques, de théâtre, d’écriture…) ou d’atelier dans lequel la dimension collaborative appelée par le recours à des savoirs et pratiques divers induit nécessairement des processus de transmission et de formation par le transfert des pratiques. Par là, c’est aussi la dynamique collective à l’œuvre en (par l’) atelier qui questionne les processus de création, dans la tension instaurée entre collaboration, co-construction, co-habitation et singularité des démarches artistiques/scientifiques. Comment l’atelier concilie-t-il dimension collective dans l’élaboration de l’œuvre et des savoirs et singularité des procès artistiques et critiques ? Lieu d’expérimentation et d’essai où le savoir-faire le dispute au non-savoir assumé, où la cohérence d’une démarche ne craint pas d’accueillir l’hétérogène et d’emprunter la ligne brisée du « zigzag », soit un « chemin qui bifurque11 », l’atelier ne cesse de questionner, de réinventer et peut-être de ré-enchanter la relation pédagogique, contrainte de modifier ses repères (et d’abord spatiaux : l’atelier n’est pas un amphithéâtre…), de ré-évaluer ses paradigmes, de réviser ses attendus… Car si l’atelier, espace même du poïétique, est ce lieu qui autorise des processus successifs de transformation et par là interroge sans relâche nos représentations, il transforme aussi ceux qui l’habitent... Autant de questions (non exhaustives) que le colloque entend explorer depuis des rives disciplinaires variées, dans un double souci de théorisation de la pratique de(dans) l’atelier / de l’atelier comme pratique et de compréhension/élaboration des méthodologies en jeu en recherche-création à partir de la question topique. Notes
PROGRAMME EN LIGNE Voir le programme détaillé en ligne sur : colloque-atelier.univ-montp3.fr COMITÉ SCIENTIFIQUE
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